Excursion au Mont Batur à Bali : Taume 1
(ou l’arrivée au Lac Batur, pour une Randonnée à Bali)
Ah tiens, j’ai un doute… Excursion au Mont Batur : Taume, Tomme, Tom, Tome ?
(Ici Londres, les Français parlent aux Français…)
Enfin, bref… Excursion au Mont Batur (prononcez « batour ») : Première partie : Arrivée au Lac Batur !
Selamat Pagi Ami Lecteur !
Bali est vraiment un concentré de tout ce qu’on peut trouver en Indonésie : des sourires, des iles, des plages de sable blanc, des plages de sable noir volcanique, des plages de galets, des cultures en terrasse, des fonds sous-marins superbes, des temples, des mosquées et des églises (sans oublier de mentionner des centres commerciaux, des warungs et des étals de street-food), mais aussi des volcans !
Un des plus couru, ou plutôt arpenté (ou en tous cas, connu) pour faire une randonnée à Bali, est le Mont Batur situé, au nord-est de l’île des Dieux.
1- Sur la route en direction du Lac Batur
Partis de Seminyak par une belle matinée pluvieuse, comme la saison des pluies sait bien en produire, nous avons pris la route, et ses trous-plein d’eau boueuse, en direction de Kintamani, un petit village en altitude, à proximité du Lac Batur et du Mont éponyme.
Et parce que la technologie, c’est quand même plus pratique qu’une carte Michelin-qui-est-impossible à replier-une-fois-dépliée-surtout-dans-une-voiture, nous avons donc suivi fidèlement les indications de notre GPS (et je n’ai pas trouvé de carte Michelin ici…) !
L’avantage avec le GPS, c’est qu’il positionne bien la voiture sur la route.
L’autre avantage, c’est qu’il propose plusieurs trajets, dont les temps de parcours peuvent varier du simple au double…
Nous donc avons opté pour le temps le plus court (en temps) dans le but, une fois sur place, de prendre le temps de découvrir les environs du volcan.
Seulement, il y a petit problème que je m’empresse de vous exposer, afin de mieux comprendre la suite du récit : le temps le plus court indiqué n’est que théorique, puisque le GPS nous fait passer par des petits détours dont lui seul a le secret, soit : au milieu des champs (oui, il y a bien un chemin, non ce n’est pas une route), des chemins non goudronnés, des chemins qui n’existent plus… Et histoire d’ajouter une petite note de fantaisie pour l’arrivée : le point de destination n’est pas forcément celui qu’on a indiqué en début de parcours…
Il faut alors faire ce que tout bon conducteur qui se respecte déteste : demander son chemin !
Et je ne déroge pas à la règle : j’aime pas ça !
Pourquoi ? Pour 2 raisons :
- D’abord, parce que je dois admettre que je me suis planté (oui, c’est pas très agréable) en ayant aveuglément confiance en
cette put***ce bijou de technologie qui m’a pourtant planté… - Ensuite parce que lorsque l’on demande aux locaux, ben ça les fait toujours marrer de voir un étranger perdu ! Et meme s’ils vous donneront de bon coeur des indications pour essayer de retrouver votre chemin, le problème est que lorsqu’ils ne connaissent pas – ou ne vous comprennent pas – ils donneront n’importe quoi comme indication, plutôt que de dire qu’ils ne savent pas !
Et ainsi donc, au lieu d’arriver 1h09min après notre départ, nous avons fait un petit détour d’une « bonne » heure supplémentaire (et c’était sans compter sur le “poétique” trafic routier balinais et les mauvaises indications des locaux du GPS) !
Mais bon, on avait le temps et en plus c’est sympa de rouler au milieu de beaux paysages ! Et comme disait l’autre : « on a fait un détour parce que c’est joli ! » (Popeye, dans « les Bronzés font du ski »… On ne peut pas toujours tomber sur une citation de Lao Tseu…).
En revanche, je ne suis pas sûr que les suspensions, les pneus et la calandre de la voiture aient beaucoup aimé les gros cailloux, ni les petits d’ailleurs, égrainés sur les chemins de traverse (mon dos, lui, c’est sûr que non !)…
Au final, je me demande si ce n’est pas « plus mieux » d’avoir une bonne carte Michelin papier, même si c’est “impossible-à-replier-une-fois-dépliée-surtout-dans-une-voiture”…
Et donc en conclusion de cet aparté, Google Map c’est bien et c’est pratique, mais à Bali il mérite quelques perfectionnements…
2- Arrivée sur le lac Batur
Enfin bref : Arrivés à Kintamani, la voiture recouverte de boue (vive les petits chemins en terre en pleine saison des pluies), nous posons nos affaires au « Lakeview Hotel and restaurant », un hôtel familial très agréable et confortable (surtout les nouvelles chambres) géré par Kadek, un balino–néo-zélandais, qui en plus de parler anglais et indonésien, parlait aussi français parfaitement (oui, y’a des gens comme ça… pour être honnête, ça énerve un peu et en plus il est très sympa) ! En discutant avec lui, nous nous découvrons lui et moi un point commun : pour lui aussi la gestion d’hôtel est un nouveau challenge ; avant cela, il travaillait dans l’environnement et les certifications…
L’hôtel est posé à flanc de montagne et offre une vue panoramique splendide sur le Mont Batur et le lac-du-même-nom.
En plus de la vue, ce qui surprend quand on quitte le confort de la voiture, c’est la température extérieure : on a perdu au moins 20 degrés par rapport à Seminyak ! Je ne serais pas étonné de voir de la neige tomber avant la fin de la journée, moi !
Bon, j’exagère peut être un tout petit peu, mais il fait vraiment frais à Kintamani (J’aurais dû prendre un pull…) !
Et parce qu’il nous reste encore du temps avant que la nuit ne jette son voile noir parsemé d’étoiles scintillantes au-dessus des sommets volcaniques et des plaines environnantes, nous décidons de partir en voiture nous découvrir les rives du lac Batur.
Belle idée que voilà, puisque nous partons sans guide (qu’il soit humain, en papier, ou électronique – donc plus de GPS – “on peut tromper 1000 personnes 1 fois, mais on ne peut pas tromper 1 personne 1000 fois, non, on peut tromper 1000 personnes, non…” bref, on essaie d’apprendre de ses erreurs) et sans savoir ce qu’il y a d’intéressant à découvrir dans les environs (à part le mont Batur bien entendu), ce qui aurait pu ainsi donner un but de visite (je sais, on aurait pu demander à la réception de l’hôtel avant de partir… mais ça aurait été nettement moins drôle).
Mais bon, comme le disait Lao Tseu au 5ème siècle avant Jésus Christ (ah ben tient justement : une citation de Lao Tseu… ça fait quand même tout de suite plus classe que “Les Bronzes font du ski”), dans tout voyage « Le but n’est pas seulement le but, c’est le chemin qui y conduit » !
Et le dit chemin est pour le moins chaotique : longeant le lac Batur, il nous donne par endroits l’impression de surfer sur des vagues, tellement il serpente le longs des coteaux cultivés (Tomates, piments, oignons, maïs – ce serait plus plat, on se croirait dans les Landes…), ramenant parfois sur les rives lac et contournant d’énormes rochers volcaniques parsemés ici et là, témoins de la dernière éruption.
A mesure que nous avançons, la campagne autour de nous se vide et la route se remplit : les femmes et les hommes quittent les champs qui bordent le Lac Batur, pour rejoindre leur village. La nuit se faisant de plus en plus insistante, il se fait l’heure de rentrer : certains en vélomoteur, d’autres confortablement assis au-dessus des récoltes à l’arrière d’un gros camion-benne.
La route n’est pas très large et les Indonésiens y conduisent comment à leur habitude : vite et au milieu de la route (pour mémoire, ou approfondissement du sujet, les règles de conduites sont décrites ici). L’exercice est donc amusant entre appels de phare, coups de klaxons et coups de volants de dernière seconde pour éviter de toucher le véhicule qui vient en face (surtout quand c’est un scooter conduit par un enfant de 10 ans), quitte à rouler sur l’herbe et les cailloux du bas-coté…
Dans les petits villages, les maisons s’éclairent les unes après les autres, et les processions des fermiers rentrant chez eux les vêtements couverts de terre, laissent place à celles, plus colorées et éclatantes, des familles se rendant au temple du village habillées en vêtement de cérémonie, les bras chargés d’offrandes.
Puis les warungs se remplissent et tout le monde se retrouve pour dîner dehors, à discuter et rigoler ensemble : en Indonésie, le mot “communauté” prend tout son sens et vivre sans les autres est simplement inimaginable.
La vie balinaise est structurée autour de la religion, au rythme des offrandes quotidiennes et des cérémonies, et toute la famille habite ensemble autour du même temple familial. Les familles vivent les unes à coté des autres et partagent leur quotidien, à l’opposé du mode de vie que viennent chercher certains occidentaux ici : se faire construire un maison isolée – mais pour combien de temps, vues les constructions qui poussent partout – dans les rizières, maisons qui deviennent des cibles évidentes pour les cambrioleurs…
Ce mode de vie, communautaire donc (au sens le plus noble du terme), permet aussi de se sentir en sécurité, les uns veillant sur les autres et en cas de cambriolage, c’est toute la communauté qui se mobilise pour se défendre. Bien sur cela implique que tout le monde soit au courant de tout ce qui se passe… En revanche la notion de vie privée reste vraiment un concept, et il ne faut donc pas s’étonner de se voir bombarder de question (du genre “où vas tu”, d’où viens tu”, “avec qui étais tu”…) par ses voisins indonésiens. Cela surprend au début, énerve un peu par la suite ensuite, mais finalement on s’y fait bien et cette curiosité naturelle rend les relations sociales beaucoup plus naturelles.
Et alors que l’économie du pays lui permet de prendre la 10ème place au niveau mondial1, “juste après la France et la Grande-Bretagne et avant l’Italie et le Mexique” et bien que des grosses disparités existent (répartition des richesses particulièrement inégale et gros niveaux de corruption à tous les étages), il en ressort tout de même que les Indonésiens se considèrent comme le peuple le plus heureux de la Terre2.
Comme quoi ce qui crée du bonheur et donne du sens à sa vie, ce sont les autres, l’établissement de lien et nos efforts pour maintenir rapports avec eux (quelque soit la distance), bien au-delà de l’illusoire bonheur immédiat et individualiste fantasmé par la consommation de masse et ses dérives, mais qui se développe de plus en plus ici (le développement économique du pays est très soutenu par un haut niveau de consommation des ménages indonésiens), au grand dam de certains Balinais. La modernité est comme une marée qui recouvre toutes les cultures et la société moderne broie les groupes et fabrique des individus.
“L’enfer c’est les autres“, faisait dire Jean-Paul Sartre à l’un de ses personnages de “Huis Clos”. Non pas que les rapports avec les autres soient “empoisonnés” ou infernaux, c’est surtout que si “les rapports avec autrui sont tordus, viciés, alors l’autre ne peut être que l’enfer.
Pourquoi ? Parce que les autres sont, au fond, ce qu’il y a de plus important en nous-mêmes, pour notre propre connaissance de nous-mêmes.
Quand nous pensons sur nous, quand nous essayons de nous connaitre, au fond nous usons des connaissances que les autres ont déjà sur nous, nous nous jugeons avec les moyens que les autres ont, nous ont donné, de nous juger.
Quoi que je dise sur moi, toujours le jugement d’autrui entre dedans.
Quoi que je sente de moi, le jugement d’autrui entre dedans. Ce qui veut dire que, si mes rapports sont mauvais, je me mets dans la totale dépendance d’autrui et alors, en effet, je suis en enfer. Et il existe une quantité de gens dans le monde qui sont en enfer parce qu’ils dépendent trop du jugement d’autrui. Mais cela ne veut nullement dire qu’on ne puisse avoir d’autres rapports avec les autres, ça marque simplement l’importance capitale de tous les autres pour chacun de nous“3.
Et si les gens ne brisent pas le cercle d’enfer dans lequel ils vivent, “c’est encore librement qu’ils y restent, de sorte qu’ils se mettent librement en enfer“.
Ainsi, quel que soit l’enfer dans lequel nous vivons (ou pensons vivre), nous avons tous la possibilité de nous en échapper et de changer les actes qui nous emprisonnent par des actes positifs qui nous libèrent, en étant – à l’instar de ce que disait Gandhi – “le changement que l’on veut voir dans le monde” !
Il est d’ailleurs étonnant de constater à quel point nous sommes tous dépendants les uns des autres, non seulement pour mieux vivre ensemble, mais aussi pour mieux en apprendre sur soi-même ; c’est par les contacts établis et la connaissance des autres, qu’on apprend finalement à mieux s’apprivoiser soi-même et à élargir nos points de vues ! Cette interdépendance n’est pas qu’humaine, mais aussi universelle : vivant sur Terre, nous sommes liés à la nature, aux végétaux et aux animaux qui la peuplent et au-delà de du monde terrestre, étant poussières d’étoiles, nous sommes d’une certaine façon liés à l’univers tout entier !
Et à ce propos, les enfants se regroupent affalés dans des sortes de cabanes sur pilotis en bord de route (avec une vue imprenable sur… les gaz d’échappements !) et loin d’être en position de méditation, écoutent la mélodie saturée d’une mauvaise techno agressive à laquelle se joignent les sons des klaxons et le bruit des voitures passant à proximité et écoutent de la musique à fond…
Si finalement, l’enfer, c’est pas les autres, la mauvaise musique en revanche c’est infernal !
Je crois que c’est évident maintenant : les Indonésiens n’aiment pas les endroits silencieux et paisibles !
Tout au bout du lac Batur, la route débouche sur un temple à côté duquel vit installé dans des conditions un peu spartiates, un artiste peintre local, qui peint des scènes du Râmâyana lui apparaissant en rêve : ici un tableau très coloré représentant Shiva, avec des temples, des visages et des corps nus ondoyant sur les vagues du lac ; là un autre tableau plein de couleur avec Ganesh, sa tête d’éléphant sur son corps humain et ses multiples bras, des temples, des visages et des corps nus ondoyant sur les vagues du lac (décidément) ; plus loin un triptyque aux couleurs vives représentant Vishnou en pleine bataille avec des temples, des visages et des corps nus ondoyant sur les vagues du lac (je crois que c’est une idée fixe…) !
Pour être honnête, je ne sais pas ce qu’ils cultivent au bord du lac, mais le moins que l’on puisse dire, c’est que cela décuple l’imagination !
Pour mémoire, le Râmâyana raconte le parcours du prince Rama, le 7ème avatar de Vishnou, et comment il va conquérir le cœur de Sita, avant – ô surprise – de se marier avec elle… C’est un des grands contes de la mythologie hindoue, avec : des hommes et des Dieux, des démons, des princes et des princesses, des enlèvements, des exils, des trahisons, des rumeurs d’adultère, des singes, des vaches, des éléphants, des batailles épiques, de la magie, de l’amour (le tout en son THX dolby-surround et en 3D dans les salles équipées) mais surtout, tout est bien qui finit bien, parce que Rama reconquiert son trône, gouverne avec sagesse royaume, se marie avec Sita, dont il aura des héritiers.
C’est tellement important dans la culture balinaise, que les scènes sont représentées partout : en peinture, en danse, en théâtre, en sculpture – dont celles qui ornent les grands ronds-points, autour duquel s’attroupent les Indonésiens pour diner le soir et assister au ballet des voitures qui tournent autour et concerts de klaxons : certes au milieu du bruit et de la pollution, mais “tous ensembles, tous ensemble, éh éh”…
Avec tout ça, la nuit a visiblement gagné sa bataille quotidienne sur le soleil ; il est plus que temps longer le lac Batur et de rentrer à l’hôtel (6 heures de soir quand même…), dîner et se coucher tôt, car le réveil promet d’être trop très matinal (merci Kadek pour le Limoncello « fait maison » : avec l’altitude il a bien aidé à partir « au pays des merveilles ») !
La suite, au prochain billet !
Et pour pour aller plus loin, voici quelques conseils afin de bien préparer vos visites à Bali :
2) https://bali-gazette.com/les-indonesiens-sont-les-gens-les-plus-heureux-du-monde/
3) http://www.philo5.com/Les%20philosophes%20Textes/Sartre_L’EnferC’EstLesAutres.htm