Premier tour de Malang en Indonésie
Selamat Pagi (“Bonjour” en Indonésien) Ami Lecteur !
On m’a toujours dit qu’il fallait que je tourne 7 fois ma langue dans ma bouche avant de parler…
Et après un premier tour de Malang en Indonésie, vu la taille de la ville, je vais vite en faire 7 !
Mais force est de constater, qu’après plusieurs semaines passées ici, j’habite dans un nouveau pays où je constate de gros décalages (pas seulement culturels) ! Et à fortiori dans les petites villes…
Les décalages ne sont pas seulement horaires… Le pays est tellement vaste, qu’il s’étend sur 3 fuseaux horaires. A ce propos, il était prévu de tout unifier et de se synchroniser avec l’heure de Singapour et de Hong Kong. Cela avait été annoncé en grandes pompes en juin 2012, avec un changement prévu pour octobre 2012… Finalement, cela est reporté aux calendes grecques ! La communication ayant été assez sommaire, les arguments avancés étaient une grosse complication à gérer à court terme, voire pire : certains avaient argué que les fidèles ne s’y retrouveraient plus dans les heures de prières…
Pourtant, une heure de plus, c’est pas du luxe, surtout que la nuit arrive à 17h30-18h ici… Heureusement qu’il fait 30° la journée, on aurait pu se croire en hiver en Europe!.
Enfin, bref, ainsi que je l’écrivais : l’Indonésie est un pays de décalages… Car comme beaucoup de pays en voie de développement, les très riches côtoient les très pauvres laissant apparaître un insolent et outrancier contraste !
Les grands centres commerciaux flambants neufs narguent les petits marchés de rue, les beaux restaurants éblouissent de leurs néons multicolores (on est saturé d’images de pubs dans les rues…), les petits “waroengs” installés en bord de rue (on retrouve des mendiants invariablement devants les 2 du reste), les grosses berlines allemandes coupent la route aux « becak » (prononcez « betchac », triporteurs à vélo) et vélos rouillés (oui et aux vélomoteurs aussi…), les maisons opulentes avec de grosses colonnes (il doit y avoir un symbole derrière ça, car ils adorent les colonnes… à croire qu’il y a une compétition), dont les prix sont supérieurs à ceux pratiqués en Europe, aux immenses façades colorées et jardins fleuris – avec des vrais trottoirs- sont en revanche bien séparées des quartiers les plus pauvres composés de maisons en tôles rouillées (heureusement ! enfin, bon je dis ça je dis rien…), grâce à de hauts murs qui se dressent telles des forteresses imprenables et des gardiens qui ferment et contrôlent les accès.
Des grands centres commerciaux modernes (même pour Malang !) :
Qui contrastent avec les marchés de rue et marchés traditionnels de Malang en Indonésie :
Aux abords de Malang, les maisons sont regroupées en quartiers (en « blocks », ou sinon en gros complexes immobiliers) dont les accès sont aussi protégés par une barrière et un garde qui ne manque pas de saluer à chaque passage.
Ceci dit, je grossis un peu le trait, car beaucoup de maisons sont d’apparences normales : 4 murs et un toit, parfois très bien entretenues. Et quand je dis « d’apparence », c’est surtout d’extérieur. Car une fois que l’on pousse la porte d’entrée et qu’on franchit le palier, ce qui frappe, c’est l’agencement intérieur. D’accord, il y a bien des chambres, une salle à manger. Mais la cuisine n’a parfois pas d’évier (juste une arrivée d’eau et une rigole en dessous… comment font-ils la vaisselle ? ben dans une bassine, et une fois que c’est fait, on vide dans la rigole…), pas de cuisinière (juste des plaques posées sur une table), quant à la salle de bain, c’est un cabinet de toilette (pas de papier mais juste un jet d’eau…) et un bac avec une écuelle pour se laver. Enfin, en tous cas, c’était une des maisons qu’on a visitées. Et ça surprend la première fois (et les fois suivantes aussi, d’ailleurs…).
Dans les maisons les plus luxueuses en revanche, on se croirait dans une banlieue chic américaine : les belles maisons aux dimensions démesurées s’alignent le long d’allées bien ombragées. A l’intérieur : tout le confort moderne (cuisine « normale », avec un équipement « normal », une salle de bain « normale », avec une douche ou une baignoire « normale » … il faut dire que ce que je définis comme « normal » s’appuie des standards Européens et qu’ici, c’est pas le même continent…) et avec à côté avec un espace réservé au personnel (dont le confort est plus spartiate), surtout la bonne.
Il faut dire qu’ici la bonne (qui, selon le regard que porte la famille sur elle, est appelée « pembantu » – aide-ménagère – ou « mbak », soit la « sœur ainée » en javanais, le mot indonésien – plus noble- étant gardé pour la vraie fille ainée de la famille…) est essentielle dans la société indonésienne, en particulier dans les grandes villes. Ayant laissé sa famille restée dans la campagne indonésienne, elle habite « à l’arrière de la maison et s’occupe de l’intendance depuis le bon fonctionnement, à la cohérence repas, au ménage, sans oublier de s’occuper des enfants. Elle ne retourne dans sa famille qu’en de rares occasions, en particulier la fête de Lebaran, celle qui succède au ramadan, laissant donc la famille livrée à elle-même et en plein désarrois (bazar dans la maison, enfants qui hurlent dans tous les sens, repas pris à la va-vite dans des centres commerciaux…)! Mais le pire, c’est quand elle ne revient pas, parce qu’elle a eu l’idée saugrenue de se marier… Et encore je dis qu’il y a une bonne, mais comme il est bon d’être servi (et d’avoir mieux que son voisin), certaines familles en ont 3-4, autant de « nannies » pour les enfants et de gardiens-jardiniers… Bref, parfois c’est presqu’un village entier qui vit dans une maison !
Il faut dire qu’on en a visité quelques unes de maisons, car en 3 mois, j’ai changé 5 fois de logement (facile pour se sentir chez soi après le boulot…) ! Maintenant, je partage une maison (assez confortable… mais pour combien de temps ? ah ah, surprise !), avec 3 autres personnes : le directeur F&B, le directeur Marketing-vente et le Chef. Au moins, chacun sa chambre !
Et si je fais le bilan : j’ai 36 ans, je suis endetté pour plusieurs années, je bosse dans un pays dont je ne connais ni la langue, ni les coutumes, ni les habitudes, je suis en collocation avec 3 indonésiens, je n’ai plus de voiture ni de moyen pour me déplacer individuellement et donc suis dépendant de transports en commun relativement complexes quand on n’est pas du coin (à moins de payer le taxi), isolé dans la banlieue d’une petite ville perdue de l’est de l’ile de Java … Alors c’est vrai que vu comme ça, ma vie semble être un succès !
Mais bon, d‘un autre côté, autant être objectif : je vis en pleine immersion dans une nouvelle culture – parfois déroutante, souvent étonnante mais jamais ennuyeuse – où chaque jour apporte son lot de nouveauté et de découverte, de nouvelles rencontres (et de gens sympathiques), me permettant d’apprendre quelque chose de nouveau que ce soit sur le pays, le métier, la culture, les relations humaines ou encore : moi-même !
A centre de la ville de Malang, on trouve un étonnant mélange de maisons des années coloniales. L’Indonésie a été occupée par les espagnols, puis par les néerlandais… lesquels ont eu une influence désastreuse originale sur la nourriture ! Honnêtement, ça mériterait de porter plainte pour crime contre l’humanité : car si la cuisine indonésienne peut être très bonne, en revanche, certains « héritages » sont plus hasardeux, telles que les bananes au chocolat fondu – miam- dessus et parsemé de… fromage rapé !), des constructions des années 30 (très art-déco) et des constructions plus récentes (nettement moins esthétiques… A croire qu’ils ont voulu concurrencer Cergy !).
Mais quelque soit l’endroit, l’agitation est une constante : dans les rues, les marchés, les centres commerciaux et le bruit permanent, c’est impressionnant !
Et parce que les gens sont très accueillants, pas intrusifs (enfin, pas dans les endroits non-touristiques) et souriants, on ne se sent jamais en insécurité… Sauf à se promener sur les trottoirs défoncés (quand il y en a, ils sont au moins hauts d’1,5 mètres et éventrés par les imposantes racines de fromagers…) et qu’on se fait frôler par des camions, mobylettes ou voitures qui charrient à leur passage autant de poussière que de gaz d’échappements (oui, il n’y a pas beaucoup de pots catalytiques et la couleur du nuage qui s’en dégage laisse peu de doutes quant à la toxicité du dit nuage… à rendre rouge de colère un élu vert !).
En effet, la circulation est relativement complexe… ou alors elle est simplifiée à l’extrême et c’est tout simplement qu’il n’y a pas de règles !
Donc, de ce que j’ai pu voir : le volant est à droite et on roule à gauche… Donc on double par la droite. Mais pas toujours, parfois on peut doubler juste en roulant sur la ligne blanche, ou par l’extrême gauche. Sur les doubles voies, il y a des espaces aménagés pour faire des demi-tours, ce qui crée des embouteillages en amont, car dans l’autre sens, on ne laisse pas s’insérer le véhicule effectuant le demi-tour-non-mais-c’est-vrai-quoi-faut-pas-déconner-sans-blagues…
Le clignotant, c’est comme à Paris : ça ne sert à rien (Rond-point des Champs Elysées : « je vous assure Monsieur l’Agent, ça fait au moins 15 ans que j’ai cette voiture et jamais je n’ai changé ces ampoules oranges… Elles sont comme neuves !), les feux de circulation : peuvent servir à arrêter les voitures et encore, pas tout le temps, ou pas toutes… De ce que je vois, pour savoir conduire ici, il faut savoir rester calme et surtout : il faut savoir klaxonner !
Pour savoir qui a la priorité, je pense que ça va dans cet ordre-là (du plus prioritaire, au moins prioritaire) : la mobylette (surtout quand on est à 4 dessus ou alors qu’on transporte en même temps des bambous et des planches de bois), les camions (qui transportent des marchandises et des gens par-dessus…), les voitures (à priori, les gros 4*4 sont plus prioritaires que les petites coccinelles… ah oui, ils sont super fans des vieux Kombis Volkswagen et de vieilles Coccinelles ici ! On se croirait dans les années 70 par moment), les becak (des vélos triporteurs, qui véhiculent aussi bien des personnes que des marchandises), les vélos et tout en bas de l’échelle : le piéton (alors lui, chaque traversée de rue devient une grande Aventure – oui, avec un « a » majuscule, à côté de laquelle la traversée de l’Amazonie par exemple s’apparente à épisode de Dora l’Exploratrice) !
Quand à la police, on la voit et entend assez peu dans les rues de Malang… Il n’y a que lorsqu’il s’agit d’escorter des visiteurs officiels que l’on entend le hurlement des sirènes !
La circulation peut être tellement compliquée que pour se garer, il faut toujours l’aide d’une personne dont c’est le vrai métier, qui vêtue d’un gilet à bandes réfléchissantes et équipée d’un sifflet et d’un bâton lumineux (comme s’il aidait à la manoeuvre d’un avion), arrête la circulation (ou la détourne) et permet de sortir de sa place.
Il peut aussi aider au parking !
Ainsi, à l’instar d’un radar de recul, il hurle “lurus” (prononcez “lourous”, ça veut dire tout droit) au lieu de faire « tututututuuuuut » pour couvrir le bruit du flot de voitures : « Luruuuuus » – vroaaaam, « luruuuuuuus » – vrooooooaaaaam, « Luruuuuuus », PAAAAAMMM !!!!
Ah ben mince, on a tapé l’arbre à l’arrière de la voiture (ça c’est sûr que quand on est sur son mobile à textoter en même temps, ça n’aide pas !)…
“Sorry Pak” !
Ah oui, « Pak » – dont on ne prononce pas le « k », car en fin de mot – c’est un titre pour dire monsieur, et qui se dit tout le temps, mais alors tout le temps… je suis devenu donc « Pak Pidjay » (non pas Pak-Man)… Alors que pour les femmes, c’est Ibu, que l’on prononce « Ibou ». Et bizarrement, ça me fait toujours penser à la comptine « dans la forêt lointaine, on entend le coucou, du haut de son grand chêne, il répond au hibou : coucou ibu, coucou ibu, coucou »… oui, je sais c’est couillon, mais bon, y’a des fois, vaut mieux rire des situations dans lesquelles on se retrouve !
Bon, ben toi, je ne te donnerai pas 2000 rupiahs pour l’aide au stationnement !
Les Indonésiens sont extrêmement connectés.
C’est incroyable ! ils ont chacun entre 2 et 3 téléphones. La grande star des smartphones est d’ailleurs le Blackberry (rendu populaire grâce à sa messagerie instantanée, BlackBerry Messenger, mieux connu sous le sobriquet de “BBM”) et ils passent un temps incroyable sur leurs téléphones. Tellement, que la batterie étant insuffisante pour une seule journée, ils ont une ou deux extension de batterie, pour être sûr de tenir. Et avec “BBM”, ça pianote dans tous les sens… Par contre, la position « silencieux » ou vibreur… Ça ne doit pas être de série sur les nouveaux BlackBerry (dans le bureau, c’est une véritable “poly-caco-phonie” qui règne).
Et le soir dans les bars, on peut voir – à l’instar de ce que l’on voit chez nous, mais puissance 10000 – des jeunes attablés plus occupés à pianoter sur leur mobile qu’à discuter entre eux… Je me demande s’ils poussent le vice à se textoter entre eux à la même table ?
Il faut dire que dans les bars, certains ne servent pas d’alcool (c’est triste…), mais des cafés, cappuccinos, mocaccinos, et des cocktails parfois bizarres (certains avec des fruits, de l’eau gazeuse et de la gelée vert-fluo). Heureusement, d’autres plus “avant-gardistes”, ou en peut être opportunistes, proposent cocktails et bières !
Mais ce qui est étonnant, c’est que chaque bar propose de la musique live (que la plupart des gens n’écoutent pas) : ainsi les groupes sur scènes s’égosillent à reprendre des standards internationaux. Le seul problème, c’est que si la musique est bien interprétée, parfois ils est impossible de reconnaitre les paroles de chansons pop anglaises (je crois avoir reconnu du Coldplay grâce à la musique, mais les paroles m’étaient complètement inconnues, pourtant je connais toutes les chansons de ce groupe !)…
Ils jouent aussi des standards locaux et visiblement l’industrie musicale est très florissante ici !
Et puis d’un coup, paf ! On se retrouve en plein décalage, notamment lorsqu’une famille vient fêter un anniversaire dans un bar-restaurant de Malang et que l’orchestre se met à chanter « Aline » (la seule chanson française que l’orchestre connait), puis « Pepito mi corazon », et que les membres de la famille se lèvent, aillent chanter avec le groupe, ou se mettent à danser sur ce qui doit être la « danse des canards » locale, en tenues vestimentaires d’un bon goût qui frôle l’indécence, notamment certaines femmes au maquillage outrageux (repeintes ?), aux mini-jupes simili-cuir, flashy et ultra-serrées, d’où s’échappent de généreuses cuisses qui semblent peiner à danser, car maladroitement perchées en équilibre sur des hauts talons et alourdies par des kilos de bijoux. C’est la classe, la grande classe même…
Et le fin de fin : elles invitent n’importe qui de l’assistance à danser avec la famille et elles… Oups, les voilà qui s’approchent !
Et sur ce : à bientôt pour la suite…
1 commentaire
Joli blog merciiiii